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Girls in Hawaii : "La nuit nous a toujours fasciné"

26 Août 2017
Girls in Hawaii : "La nuit nous a toujours fasciné"

On sait depuis longtemps qu’il ne faut surtout pas croire leur nom : Girls in Hawaii est entièrement composé de garçons venant de Belgique. Impossible de ne pas ressentir une tendresse infinie pour ce groupe humble et discret, dont la musique entre folk, pop et rock atteint des sommets de sensibilité et d’intelligence. Alors que le groupe s’apprête à sortir son nouvel album, intitulé Nocturne, rencontre avec son chanteur, Antoine Wielemans…

A propos de Nocturne, il y a un court texte, pas de présentation mais d’introduction à l’album. Le voici : « It is about being alone in the heart of the night / It is about occupying private worlds / Seemingly lost in reverie / It sis about us and that magical space of freedom the night can be. » C’est très beau mais aussi très énigmatique. Pouvez-vous nous expliquer cet « espace magique de la nuit » ?

« La nuit nous a toujours fasciné. Le temps s’arrête quelque peu, il y a du silence, personne pour te déranger… De tout temps, on a travaillé durant la nuit. C’est peut-être un peu moins le cas depuis que certains d’entre nous sont devenus parents. Mais au début du processus de création de ce disque, on était un peu coincé. On ne savait pas trop ce que l’on voulait y raconter. Everest, le disque précédent, avait été un peu chargé en émotions et en signification. C’était un peu compliqué d’imaginer ce que l’on pouvait bien faire après. Du coup, entre autres choses, on s’est retrouvé à faire des séances d’hypnose avec un psychologue. Cela pouvait durer 2 voire 3 heures durant lesquelles on vivait une sorte de rêve en état de semi-conscience. On n’est pas totalement endormi, on répond aux questions que l’on nous pose et se crée ainsi une conversation où on va chercher des choses en nous. Le conscient et le surmoi ne réagissent plus beaucoup. »

 

 

Ces séances étaient enregistrées ?

« Non, c’était vraiment sous forme de discussions où se créait généralement une sorte de récit très proche de la symbolique et des images d’un rêve. C’est à toi d’aller chercher des significations. Quand tu te réveilles, tu as l’impression que ça a duré 10 minutes or la séance a fait 2 heures ! Ce n’est que le lendemain ou le surlendemain que tout commence à te revenir. On s’asseyait alors à une table avec un stylo, du papier et pendant une heure on notait tout, toute l’histoire déroulée durant la séance. C’est très curieux. Et du coup cela a ouvert des champs d’idées, d’images et de paroles. La proximité du monde des rêves nous a ramené à cet univers nocturne. »

Chaque année résume les dernières années de vos vies. Que résume Nocturne ?

« C’est peut-être moins le cas pour Nocturne. Dans les albums précédents, on parlait beaucoup de nous. Ils étaient comme des carnets de bord. Avec ce disque, on voulait le moins possible parler à la première personne, mais davantage raconter ce qu’il y avait autour de nous. D’une certaine manière, c’est le carnet de bord d’une époque, mais sans être particulièrement intime. »

Vous avez déclaré que vous espériez toujours que votre meilleur disque était toujours à venir. Est-ce le cas avec Nocturne ?

« On a radicalement changé notre manière d’écrire. On voulait se mettre en danger. Chacun dans notre coin, Lio et moi avons fait des démos pendant six mois. On passait maximum 48 heures sur un morceau puis on le mettait de côté. On en a accumulé ainsi une trentaine. On est ensuite allé voir notre producteur qui s’est montré tout de suite enthousiaste car les choses étaient très peu figées. Par le passé, on pouvait travailler un mois et demi avant même de rentrer en studio. Là on est arrivé avec des idées un peu plus vaporeuses, avec quelques éléments qu’on aimait bien mais aussi des parties peu développées ou qu’on aimait moins. Du coup on a passé un mois en studio où on passait encore une fois 48 heures sur une chanson. C’était aussi une approche beaucoup plus minimale, on voulait vraiment dépouiller au maximum le disque. Au niveau production, on est vraiment hyper content de ce disque. »

 

https://www.youtube.com/watch?v=2UAqsmHi2vI

 

L’expérimentation d’Hello Strange a-t-elle changé votre manière d’aborder les compositions ?

« Complètement ! Surtout dans cette volonté de se mettre en danger. On a voulu travailler à nouveau dans une forme d’urgence. »

Est-ce aussi une nécessité de se réinventer quand on vieillit dans la musique et avec sa musique ou est-ce que c’est simplement organique ?

« Les deux. Il y a un côté laboratoire dans le fait d’apprendre à maîtriser quelque chose. Depuis 2 ou 3 ans, on a écouté beaucoup de musique électronique et de hip hop. On a été fasciné par une forme de minimalisme du hip hop justement. C’est un peu ce qu’on avait envie de faire, pour découvrir une nouvelle façon de faire, chercher quelque chose de différent pour ne pas avoir l’impression de refaire le même truc. On essaie bien entendu de garder notre amour des arrangements et des mélodies mais de le retravailler différemment. »

Votre musique évoque souvent la nostalgie, aborde parfois la tristesse de front… mais ne sombre jamais dans l’apitoiement.

« C’est d’abord le plaisir de la musique. N’importe quel art créatif permet d’exprimer, de puiser dans tout ce qui est pénible dans la vie, pour transformer ce réservoir d’émotions dures et compliquées en quelque chose de plus lumineux. Il y a toujours une teinte mélancolique mais on a envie de l’exprimer à travers quelque chose de beau. »

 

 

From Here to There, votre premier album, est sorti en 2004. Quel est votre sentiment lorsque vous réécoutez les chansons de vos débuts ?

« Beaucoup de gens nous parlent encore de From Here to There, qui est devenu une forme de disque générationnel. C’est sans doute lié à la manière dont on l’a fait : à la maison, sans forcément avoir les moyens d’aller en studio. Il était très bricolé. Il a quelque chose d’assez brut et d’indémodable, il contient peu d’effets de style. C’est un peu un disque carte postale, il capture des moments. Dans le ton de l’album, il y a quelque chose de très particulier, difficilement transposable sur scène. »

Propos recueillis par Thomas Destouches

SCÈNE CASCADE
sam. 26 août, 17:25 > 18:15