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The Murder Capital : « Créer un groupe, c'est un état de constante rébellion »

13 Sep 2023
The Murder Capital : « Créer un groupe, c'est un état de constante rébellion »

C’est avec joie qu’on a accueilli cet été un jeune groupe post-punk de Dublin. Fontaines D.C. ? Pas cette fois, la bande à Grian Chatten étant déjà venue l’année dernière. La bonne réponse était The Murder Capital, repérés à notre festival dès leur éclosion en 2019.

Dans un tourbillon de guitares abrasives, de batterie sous tension et de voix au bord du gouffre, ces héritiers de Shame et d’Idles avaient déjà impressionné alors qu’ils venaient de sortir à peine dix jours avant leur premier album, When I Have Fears.

Porté par l’élan ravageur de son leader charismatique, le chanteur James McGovern, le fougueux quintet passe aujourd’hui à l’étape suivante avec son deuxième album, Gigi’s Recovery, sorti en janvier 2023. La fièvre n’est pas retombée, et c’est tant mieux.

Rencontre.

Vous étiez déjà venu en 2019. Vous vous êtes senti comment pour cette seconde fois à Rock en Seine ?

On a été scotchés. La première fois, on savait qu’on allait s’amuser, que ce serait un super festival à faire, et on a été scotchés par le nombre de gens qui sont venus nous voir, qui sont restés pour notre set. Notre concert a été un moment génial à l’époque, en 2019.

Mais aujourd’hui, le fait de revenir après avoir eu cette première expérience, et de passer en quelque sorte au niveau supérieur, l’énergie qu’on a reçue de la foule aujourd’hui, c’était… on n’a jamais vu ça avant. (rires) De notre côté, on aurait voulu faire encore mieux en terme de jeu et donner une performance encore meilleure mais de voir la foule interagir comme ça avec nous, c’était incroyable. C’était assurément le meilleur concert qu’on ait jamais fait.

En quoi ce concert était meilleur que les autres ?

Le simple fait de voir autant de gens. Une foule qui s’étend à perte de vue. Voir tout le monde en train de bouger, tout le monde en train d’applaudir, tout le monde dedans, à vivre le truc. Ce sont tous ces petits instants au fil du concert, juste le feeling, une sensation de liberté qui te traverse le corps, la manière dont tu te sens sur scène. Et ça ne marche pas à tous les coups, parfois ça s’arrête. On a pu avoir des jours off, des jours où ça ne fonctionnait pas, et on sait souvent l’expliquer après, mais aujourd’hui tout s’est aligné. On ne s’attendait pas à vivre ça, il y avait une énergie de dingue.

Parfois, les seconds albums sont plus calmes dans le rock. Pas le vôtre, même s’il y a quelque chose de différent. 

Je crois qu’il y a des passages où l’exercice d’introspection est différent. On a pris une approche cinématographique, le procédé qu’on avait pour écrire certaines chansons du premier album comme Slowdance ou l’intro de For Everything par exemple. On a puisé dans la même veine, ce côté assez exubérant dans le son.  Avec cet album, on voulait communiquer quelque chose qui nous sortait de notre zone de confort en termes de son. Et ça vient nourrir la manière dont nos concerts se déroulent, la vibration sur scène. Là, l’énergie était parfaite. On a pu à la fois exprimer et recevoir les émotions qu’on a mises dans cet album. Quand il s’agit d’écrire les chansons, il faut que le sentiment soit authentique, qu’on se sente sincère sur le moment et que ça sonne vrai, arriver à mettre le doigt sur ce truc intangible.

Vous êtes devenu, avec Fontaine D.C et quelques autres, les nouveaux visages de la scène dublinoise. Comment l’expliquez-vous ?

Tu veux dire, comment on a réussi avec ces tronches-là ? (rires)

Alors non, juste, c’est nouveau pour nous les Français que les Irlandais cartonnent ici.

On n’a pas d’explication, on dira juste qu’on est désolés et qu’on va bientôt s’en aller. (rires)

Le punk, c’est un esprit de révolte avant tout. Vous fonctionner avec ça ?

Le truc avec l’esprit de rébellion à l’adolescence, c’est que c’est moins un vrai sentiment de colère qu’un désir d’être aimé. Je crois que plus on avance, plus on se rend compte que c’est vrai. C’est aussi un état de déni constant, quand tu te rebelles. Rien que de chercher à faire carrière dans la musique, ce n’est pas la norme. Créer un groupe, c’est un état de constante rébellion, et s’accrocher à ça plutôt que de faire un boulot normal comme n’importe quelle personne saine d’esprit.

Selon moi, votre musique n’est pas que punk, elle dévoile aussi une certaine poésie qui passe par l’osmose entre vous.

Oui, j’ai l’impression que c’est vrai, on veut bien s’approprier ton compliment. On ne se considère pas comme des punks. On connait des vrais punks et ce n’est pas la même chose.

C’est juste une étiquette le punk ?

On a un côté punk. On a écrit More Is Less et For Everything qui sont dans cet esprit. Quand on est musiciens, il y a beaucoup de choses à exprimer sur scène. On veut qu’il y ait une certaine liberté de mouvement dans nos concerts. Dans ces moments-là, on veut explorer ce mouvement et cette connexion avec les autres, ce côté revendicateur. Ce n’est pas tant dans notre son que dans notre façon d’incarner notre musique. Parfois notre musique peut être complètement à l’opposé du punk, avec des parties planantes, un côté atmosphérique. Je crois qu’au bout du compte, Murder Capital est défini par ses contradictions. Comme les êtres humains.

Propos recueillis par Alexandre Mathis

Crédit photo : Louis Comar