
Gildaa ne laisse pas de marbre. Une créativité folle, une singularité qui pique la curiosité, une dérision envers soi et l’absurdité du monde et un sens de la théâtralité sont quelques-uns des atouts qu’elle a dans sa manche.
A la fois clown mélancolique et diva excentrique, cette Franco-Brésilienne ne ressemble à personne d’autre qu’elle-même – on pourrait éventuellement la rapprocher de la fantaisie hors normes de Brigitte Fontaine et de CocoRosie, mais ce serait loin d’un résumé exhaustif. En attendant un premier album prévu pour l’automne 2025, cette artiste bilingue prend d’assaut les scènes de France et nos oreilles avec une succession de singles prometteurs (Pensées diluviennes, Pas assez), d’une originalité sensationnelle, où elle croise pop, effets electro, violon, cadences afro-brésiliennes et textes mystiques.
Rencontre.
Gildaa : “Je m’appelle Gildaa, je suis franco-brésilienne, et je fais de la musique que je situe entre Stromae, Ibeyi, Bach et peut-être SAULT. Tu as écouté leur dernier album ? Il est incroyable !”.
Peux-tu me raconter tes débuts ?
Gildaa : “J’ai commencé par jouer du violon quand j’avais cinq ans, cinq ans et demi, et j’en ai fait pendant dix ans. Puis j’ai eu des envies de jazz et de R’n’B, mais je n’ai pas pu en faire à l’époque, je me suis donc tourné vers le théâtre pour me connecter avec ce sentiment de liberté. Mais à un moment donné, j’ai retrouvé la musique. Cependant, je n’ai pas eu de déclic, je ne me suis pas dit “c’est mon métier”, en fait ça m’a attrapé, ça ne m’a pas laissé le choix, j’ai été happée par cette passion”.
Un sentiment euphorisant j’imagine.
Gildaa : “Cette musique qui me happe, ce n’est jamais un sentiment paralysant. C’est enivrant ? Je ne sais pas. Mais pour le dire plus simplement, je dirais que la musique, c’est ma colocataire”.
Une colocataire avec qui tu travailles nuit et jour donc.
Gildaa : “Je dissocie la joie et le plaisir. Quand on me dit qu’il faut prendre du plaisir dans ce métier, je ne suis pas forcément d’accord. Prendre du plaisir pour moi, c’est, par exemple, manger un super bon truc. Mais éprouver de la joie est un sentiment bien plus actif, et qui est poreux, qui ouvre la voie à bien d’autres émotions. Mais je reste prudente. Le thème de la santé mentale, c’est très important pour moi. Cela inspire même le projet, je ne saurais pas forcément te dire comment, concrètement, mais c’est là. Et je sais qu’un jour, cela prendra encore plus de place dans ma création”.
Une création qui semble sans fin, le projet est toujours en mouvement.
Gildaa : “L’inspiration est partout et elle appartient à tout le monde. Je pense qu’il faut juste être prédisposé à l’entendre, à se faire susurrer des idées dans l’oreille. Après, l’inspiration, c’est aussi l’entourage, les gens qu’on rencontre. On n’a rien inventé, tout a été fait, mais pas par nous, on pique, on reprend, on remet à jour. On est bouffé aujourd’hui par une activité mentale constante, par nos téléphones, ce genre de trucs. On ne laisse plus assez de temps à l’oisiveté, au rien. J’ai beaucoup de mal, je dois l’avouer (rires)”.
Tu écris comment ?
Gildaa : “J’aime écrire dans les transports. Ma famille est éparpillée dans trois grandes villes au Brésil, et le pays est immense, et tu dois souvent prendre des bus. Cela m’est arrivé de passer entre huit et vingt heures de voyage dans un car, et d’écrire sans cesse. Le mouvement me permet d’ancrer l’idée. Dans mon petit carnet. Ou une note vocale sur mon téléphone portable”.
Tu seras à l’affiche de Rock en Seine le samedi 23 août. La scène, tu t’y sens bien ?
Gildaa : “Le live et le disque sont deux choses totalement différentes pour moi. Pour moi, la musique commence sur scène. Mais la scène me permet également de la finir. Je travaille depuis plus de quatre ans sur l’album, produit par ma sœur et mixé par Mathias Durand, qui est aussi sur scène avec moi, donc depuis 2021, tout a beaucoup évolué. Je te parlais de SAULT et c’est vraiment un artiste qui compte, car c’est très acoustique et en même temps incroyablement produit. C’est ample ! Et tout de suite, quand tu l’écoutes, tu es quelque part, il y a un endroit, un récit. Pour moi, une chanson est terminée quand en fermant les yeux et en l’écoutant, elle m’emmène dans un endroit précis”.
SAULT, c’est aussi une forme de mystère, mais un travail autour de ce mystère. Il y a une écriture de l’absence.
Gildaa : “C’est très juste. Je pense aussi à l’extra musical, au récit autour de ma musique, en tout cas j’aime de plus en plus y penser, aussi parce que je suis entouré de gens hyper forts, qui m’apprennent mille choses sur l’image. Au départ, ça m’a tétanisé pas mal, honnêtement. Ce que j’ai depuis le début, sur scène, c’est mon peignoir et mes chaussons. Mais à part ça, je n’avais rien de fondé. De concret. Quant à savoir pourquoi le peignoir et les chaussons, je ne sais pas d’où ça vient (sourire)”.
Tu crois au hasard ?
Gildaa : “Je ne crois pas du tout au hasard. Je crois à la providence. Je crois aux signes. Mais j’ai aussi grandi dans une famille ultra spiritualisée, où tout est langage, où tout arrive pour une raison, que tu ne comprendras peut-être que bien plus tard, quinze ans plus tard. Mais le hasard… Non. Et en même temps, je te dis ça, mais je ne sais pas. J’hésite, je crois”.
Propos recueillis par Nico Prat.
GILDAA en concert à Rock en Seine le samedi 23 août 2025.