Il fut le guitariste des Pretenders, The The, des Cribs, de Modest Mouse. Sans oublier, évidemment, The Smiths.
Depuis une dizaine d’années, Johnny Marr poursuit une carrière solo passionnante, dévoilant ses talents de songwriter et de chanteur à chaque nouvel album – comme en témoigne le dernier en date, Call The Comet (2018), porté par les tubes The Tracers et Hi Hello. A 55 ans, cette légende vivante continue à donner des performances incandescentes. Ce fut le cas, cette année, à Rock en Seine.
Entretien.
« Les textes d’une chanson sont de la poésie. Mais ce n’est pas de la prose, ils doivent coller à la musique. Tu peux écrire un très beau texte qui ne marchera pas avec la musique. Exemple : Blondie, tu connais la chanson Union City Blue ? Tout sonne parfaitement bien. Et pourtant, ce refrain ne te raconte pas grand chose. Mais c’est parfait. Tu peux juste avec un bon riff l’accompagner d’un seul mot. Les gens pensent parfois qu’une chanson doit être profonde. Mais la pop ce n’est pas ça. Pas toujours. La combinaison d’une phrase et d’une mélodie peut être brillante, alors que sur le papier, le texte ne sera pas particulièrement beau ».
Certains de vos textes pourraient parler d’une chose ou d’une autre…
J’ai appris à être mystérieux, en quelque sorte. Sur mon dernier album, il y a une chanson qui se nomme Day In Day Out. Pendant des jours entiers, des semaines, j’ai cherché une issue à ce refrain. Puis, un jour, c’est venu, en lisant je ne sais plus quoi. Cette chanson parle d’obsession, artistique surtout. Mais je ne me force pas à l’expliquer. Sur mes premiers albums en solo, je voulais écrire sur le monde qui m’entoure. J’ai imaginé des histoires, des personnages. Je ne voulais pas chanter sur moi-même, tout le monde le fait, trop. Mais sur ce disque, disons que certains mots me sont venus différemment, et si tu ressens une émotion, alors tu ne peux pas ne pas aller jusqu’au bout, ne pas sortir la chanson. Une chanson parle de ma fille, par exemple. Je ne voulais pas écrire sur elle, mais la chanson était si belle, que je me suis dit que j’allais devoir aborder un sujet que j’aime. Et je n’aime personne davantage que ma fille, évidemment.
Vous aimez chacune de vos chansons ?
« Certaines de mes anciennes chansons comptent énormément pour les gens, comme tu le sais. Je sais que ces chansons sont importantes, et cela m’impressionne toujours autant, de voir des tatouages des chansons des Smiths par exemple. Mais pour être franc, je pense toujours que j’aurais pu faire mieux. Je pense cela de chacune de mes chansons. Je ne peux rien y faire ».
Pourquoi votre album avec The Healers, au début des années 2000, n’était pas en fait un album solo ?
« Pour The Healers, à l’époque, j’étais trop timide. Je ne voulais pas que mon nom soit en avant. Mais j’ai appris avec les Healers à monter et tenir un groupe, à être un bon leader. J’ai joué avec de très grands leaders, et quand tu t’avances sur scène avec ces gens, tu te sens en confiance. Je travaille en permanence sur ce sentiment ».
Vous semblez davantage apprécier les interviews que par le passé.
« La presse anglaise, à l’époque des Smiths, me prenait un peu pour un idiot. Morrissey était le génie, moi j’étais juste le rockeur. J’ai un peu joué ce rôle… Mais bon, moi aussi j’ai lu des livres”.
Propos recueillis par Nico Prat
Le live de Johnny Marr à Rock en Seine 2019 est à revoir ICI (le live n’est plus disponible).