[ITW & SESSION] West Thebarton : "Toutes les chansons de l'album sont des petites histoires"
Cette troupe mixte australienne a beau être menée par un dénommé Reverend Ray (leader charismatique à la voix rock et rocailleuse), elle n’est pas pour autant composée d’enfants de chœur – loin de là.
Anciennement connu sous le nom de West Thebarton Brothel Party, le groupe a raccourci son nom l’an dernier en n’en gardant que les deux premiers mots, ce qui simplifie la tâche aux Français fâchés avec la langue anglaise. Histoire de savoir à quoi s’attendre lors de leur concert, précisons qu’ils ont partagé la scène avec leurs compatriotes Courtney Barnett et King Gizzard & The Lizard Wizard. Grâce à leur rock viscéral et enragé, à écouter sur leur premier album (Different Beings Being Different, sorti cette année), ils redonnent l’espoir aux amateurs de rock à guitares.
Vous avez pris beaucoup de temps pour écrire ce premier album. Et vous l’avez enregistré en seulement une semaine…
Ray : Pour l’enregistrement, on voulait capter notre état du moment. Cela faisait un bout de temps que l’on jouait ces morceaux, on les connaissait très bien. Notre producteur est venu de Sydney pour une semaine au studio, qui était proche de la mer, vraiment un bel endroit… et oui, on a enregistré l’album en une semaine ! Finalement c’était tout le temps dont on avait besoin. Et on était très content du résultat.
Comment définiriez-vous le « pub rock » ? Il existe beaucoup de clichés voire de mythes autour de ce genre ?
Ray : Oui, il y a en effet beaucoup de clichés sur le pub rock. Je dirais d’abord que ce n’est pas une musique qui devrait être jouée dans des stades immenses. Elle a sa place dans les pubs, où tout le monde peut venir et repartir, boire un verre…
Josh : Oui boire des verres et prendre du bon temps avec de la musique forte.
Il y a une vraie influence soul dans ce premier album…
Ray : J’ai grandi en écoutant de la soul ! Ma mère écoutait tout le temps Otis Redding. Quand j’ai débuté dans la musique, je voulais vraiment être un chanteur de soul. C’est intéressant que vous en parliez. Bien évidemment, notre musique est traversée par énormément d’influences et de genres : shoegaze, punk…
Comment un groupe de 7 membres s’organise pour écrire des chansons ?
Josh : Avec difficulté ! (rires)
Tom : Généralement l’un de nous vient avec une sorte de squelette de chanson et des idées sur l’éventuelle direction à prendre. On échange, on fait des suggestions et on commence à écrire dessus ensemble.
Ray : Quand 7 personnes écrivent une chanson, il ne peut y avoir une formule établie. On a nos habitudes, quelques repères, et tout finit par toujours s’emboîter. Mais cela ne pourrait pas être possible sans le profond respect que l’on a les uns pour les autres.
Pour continuer un peu sur vos chansons, il y en a une qui vous a posé de grandes difficultés à Ray : « Reasons ». Vous avez fait plus de 30 prises…
Ray : Cette chanson avait une profonde signification pour notre groupe. Quand on était en train de la composer, on était tous touchés par des événements importants ou graves dans notre vie personnelle. La première fois qu’on l’a jouée, chez nous, devant notre public, quelques personnes ont même pleuré. Quand on l’a enregistré, je voulais donc qu’elle soit vraiment parfaite. J’ai enchaîné les prises pour que ce soit le cas et à chaque fois, j’étais mécontent, j’avais le sentiment qu’il manquait quelque chose, que c’était moins bien… Certes, cela n’aidait pas que je prenne une gorgée de whisky après chaque prise ! (rires) Je me rappelle être revenu chez moi ce soir-là éreinté par ces 30 ou 40 prises et mécontent. Peu de temps après, le producteur est venu me voir pour me faire écouter une bande que j’ai trouvée formidable. J’ai commencé à le remercier d’avoir réussi à mélanger les prises pour atteindre cette perfection que je désirais. Il m’a alors répondu qu’il n’avait fait aucun mélange et qu’il s’agissait en réalité de la 3ème prise. La 3ème prise ! (rires) A chaque fois que l’on joue cette chanson, cela nous rappelle les mauvais moments vécus au moment où on l’écrivait. Et notre cœur bat toujours plus fort à cet instant. Elle signifie beaucoup pour nous.
D’autres chansons de l’album font référence à des histoires personnelles ou sont des récits auxquels on peut s’identifier. C’est aussi ce qui donne cette proximité au disque et sa dimension soul…
Tom : On en revient à la définition de pub rock. Ce n’est pas destiné à un stade ou à un grand show. C’est destiné à un public juste à côté de la scène. Et ce n’est pas une musique de snob.
Ray : Toutes les chansons de l’album sont des petites histoires. Une histoire personnelle, celle d’un ami ou que j’ai imaginée. C’est ce qui les rend justement à la fois intimes et universelles. Je suis une personne normale, comme tous les membres du groupe. On parle de choses que tout le monde peut vivre ou connaître.
Il y a un vrai sens de la communauté qui se dégage de ce groupe. C’est aussi ce qui le rend attachant…
Tom : On est amis. On vit tous dans le même coin, à 2 minutes l’un de l’autre.
Vous venez et vous habitez encore Adélaïde. Vous semblez très attachés à cette ville…
Ray : Adélaïde est une petite ville. Les gens la quittent souvent pour aller s’installer à Sydney ou Melbourne. C’est pareil pour les groupes. Quand ils deviennent plus importants, ils partent pour les villes plus importantes. Quand on a commencé à devenir populaires à Adélaïde, on a choisi de rester. Et on en est plutôt fiers. On aime profondément cette ville.
Propos recueillis par Thomas Destouches