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At The Drive-In : moments clés (2/3)

05 Avr 2017
At The Drive-In : moments clés (2/3)

Pour réviser un peu avant leur concert à Rock en Seine, voilà trois moments-clés dans la carrière d’At the Drive-In, quintet aussi éphémère que fascinant, qui a marqué le passage d’un siècle à l’autre grâce à son énergie et son talent insolents.

Pour beaucoup, le nom « At the Drive-In », c’est comme une odeur de cannelle, le toucher d’un tissu, le souvenir d’un pays lointain… une madeleine. Il suscite la nostalgie d’un temps où la radio diffusait de la musique à guitares, où le terme « post-hardcore » faisait encore rêver (et non pas bailler), d’un rock flamboyant et urgent, choral, surréaliste, les émotions à fleur de peau.

On parie que vous serez des milliers à prendre un pied monstrueux à Rock en Seine cet été devant la reformation des Texans. Mais pour vous y retrouver parmi leurs mélodies de guitare tirées par les cheveux et leurs rythmiques perdues quelque part entre le punk, la salsa et le hardcore, on vous propose de réviser avec trois dates essentielles dans l’univers du groupe.

Relationship of Command, la consécration

Quatre petites années plus tard (lire la première partie, ndlr), à force de performances live époustouflantes et de dévotion totale à son art, ATDI fait sauter peu à peu le plafond de verre qui les sépare de la renommée. Après de nouvelles tournées et la sortie d’un second album plus abouti, In/Casino/Out en 1998, le groupe suscite finalement l’intérêt hors du milieu strictement underground.

A ce moment-là, At the Drive-In n’a pas oublié en cours de route son envie d’en découdre sur scène. Après avoir enflammé les planches des salles d’Amérique du Nord pendant trois ans avec de grands noms comme Fugazi, AFI, Jimmy Eat World pendant de longues semaines, le groupe en profite pour montrer à la vieille Europe quel bois il se chauffe : en 1998, At the Drive-In embarque pour sa première tournée européenne et enchaîne six semaines de concerts dans onze pays différents. Infatigable.

De retour au pays, les tourneurs s’arrachent ces cinq kids du Texas coiffés d’étranges afros afin d’ouvrir pour les stars de l’emo d’alors, The Get Up Kids, ou encore Rage Against The Machine. C’est à New York, lors d’une énième tournée, qu’ils font la connaissance de Ross Robinson, déjà responsable à l’époque du son de Korn, du Roots de Sepultura, de Vanilla Ice ou de Slipknot. Malgré leurs réticences à travailler avec un producteur aussi célèbre (et aussi metal), le label insiste et leur propose d’enregistrer un morceau avec lui en guise de test. Finalement satisfaits du résultat, les Texans acceptent : rendez-vous est pris en janvier 1999 à Malibu, chez Robinson, pour enregistrer le nouvel LP d’At the Drive-In.

De cet enregistrement, Blaze James de Flipside, devenu manager du groupe, se remémore les sept longues semaines de labeur intense. Ross Robinson a cette réputation de demander énormément aux musiciens avec lesquels il travaille et ATDI est passé par là : « ça peut sonner cliché, mais leur sang, leur sueur et leurs larmes ont été littéralement étalés [sur ce disque] ». Dans une interview à  Alternative Press, le guitariste Omar Rodriguez-Lopez raconte qu’un jour le producteur a embarqué Paul Hinojos, le bassiste du groupe, dans son 4×4 pour une dangereuse virée pied au plancher le long des falaises de Malibu. Pourquoi ? Afin que son adrénaline soit à son maximum pour l’enregistrement, voilà pourquoi.

Le résultat, c’est Relationship of Command : une production en acier trempé, des arrangements riches, des titres imparables et une fraîcheur encore intacte. « Arcarsenal » et son intro guerrière, le refrain catchy de « One Arme Scissors », les riffs tout en dissonances de « Mannequin Republic », la violence joyeuse de « Extracurricular », l’ADN punk totalement brut, le post-hardcore matiné d’emo à son sommet… et même un guest en or pour pousser a chansonnette : Iggy Pop.

Grâce à cet album, sorti le 12 septembre 2000, ATDI entre durablement dans la légende  – non seulement dans celle d’un certain hardcore américain, mais de la musique pop contemporaine. Dix-sept ans plus tard, il est encore incontournable ey c’est sans doute cela qui caractérise le mieux l’expression mille fois entendue d' »album de la maturité » : être perçu à son tour comme une influence pour les autres. Au même titre que des albums comme Songs for the Deaf, Is This It, Figure 8 ou Kid A, le disque Relationship of Command balise le parcours du rock pour les kids du XXIe siècle.

Pourtant, il y a toujours un irréductible sur Terre pour trouver cet album est insupportable : Omar Rodriguez-Lopez lui-même. A Alternative Press qui revenait sur les 10 ans de ce disque incontournable en 2010, le guitariste confie « ce disque est ruiné par son mixage. Je trouve que c’est le plus passif, le plus plastique qu’on ait enregistré. A ce jour, c’est toujours l’album d’At the Drive-In que je ne peux pas écouter ». Qui a dit « jamais content » ?

Théo Chapuis