La Chica, c’est Sophie Fustec, une Franco-Vénézuélienne qui a grandi entre Belleville et l’Amérique latine et qui vient de sortir son premier album en février.
Intitulé « Cambio », ce premier essai latino-pop confirme tous les espoirs placés en elle depuis qu’on l’a remarquée au sein du groupe 3SomeSisters. En solo, cette Chica chic diffuse sa double culture dans sa musique et prouve qu’elle n’a rien d’une débutante : sa dextérité mélodique et sa maîtrise technique s’explique par une dizaine d’années au conservatoire et des études d’ingénieur du son à l’ESRA. Son aisance en concert vient de ses multiples expériences à partager la scène avec Rone, -M-, Yael Naim, Pauline Croze, ou encore Juana Molina. Une musique qui montre ses origines mais se tourne vers l’avenir, dans des collages sonores sublimes.
Quelles sont les trois choses qu’il faut savoir sur toi pour comprendre ta musique ?
J’ai une schizophrénie culturelle et elle va se traduire dans ma musique. On ressent pas mal cette oxymore. Une jolie opposition d’éléments qui ne sont pas du tout fait pour être mis ensemble mais qui forme un tout dans lequel je me reconnais. Ça a été une recherche identitaire très importante.
Je suis super fan de Thom Yorke.
Je suis une guerrière. Tu vois bien, je monte sur scène en short de boxe parce que je vais au combat. En revanche, c’est pas comme ça que j’ai réfléchi quand je me suis lancée. Au lieu de monter sur le ring qu’est la scène, ça a été un enchaînement de coups de chance, j’étais sideman pendant 12 ans et très timide. Je ne savais même pas qu’on pouvait en faire un métier. J’ai été à l’encontre de ma nature et de ma timidité pour travailler sur mon propre projet.
T’es dans l’action permanente ?
J’aime bien me fixer des buts parce que ça rend très triste et frustrée d’être dans l’endormissement social. Je préfère les gens qui y vont quitte à se prendre un mur que l’inaction.
Qui sont les trois artistes vénézuéliens qui faut absolument que écouter ?
Oscar D’León pour toute la partie salsa folklorique vénézuélienne qui est une partie importante de la culture.
Tout l’héritage africain avec les tamborès de la côte, il faut écouter le groupe Tambor Urbano. C’est des tambours et des chants, c’est que de la rythmique. Ça chante faux mais on s’en fout parce que c’est que de l’expression primitive.
Simón Díaz, c’est un vieux chanteur tellement mignon. Il représente la culture du peuple des Llanos, des grandes plaines. Il y a du cuatro, des maracas et de la basse, parfois de la harpe andine, c’est du folklore. C’est roots et rythmique. C’est typique.
Je m’intéresse vachement à ce qu’il se passe en Afrique, tout le monde croit que c’est des tambours mais c’est la folie de modernité. Les rappeurs vénézuéliens s’inspirent de ce qu’il se passe là-bas, mélangent, apprennent. Personnellement, je suis à l’affût et je suis ça de très près.
Visuellement, ton travail est très proche de celui de M.I.A. qui, comme toi, est partagée enter deux pays, le Royaume-Uni et le Sri-Lanka…
Et bien elle aussi est très influencée par la musique brésilienne, notamment le baile funke. Elle a inventé sa musique, c’est fascinant. C’est une artiste très importante, elle m’a beaucoup influencée dans le combat. Elle a le même combat depuis le début mais elle a su le transformer au fil des années. Elle passe ses messages de manière très subtile notamment via un univers pop et graphique incroyable. Elle est juste libre et c’est ça qui me touche.
Propos recueillis par Sarah Koskievic